Natacha : Entrepreneure passionnée dans la mode, l’art et le lifestyle écoresponsables

Natacha a créé Poesia Consulting pour accompagner des créateurs, des artistes et des jeunes marques écoresponsables. Avant de créer son agence, elle a monté d’autres projets et traversé des difficultés. Elle témoigne ici de son parcours entrepreneurial dans l’univers de la mode et du lifestyle : première expérience, association, rencontres, échecs, opportunités… Une belle aventure à découvrir !

Bonjour Natacha, raconte-nous ton parcours en toute transparence ?

Après mes études en IUT Communication, j’ai intégré l’ISTA, l’école de mode qui me plaisait. J’ai travaillé en alternance pour une jeune marque de prêt-à-porter femme. J’ai découvert les étapes de la création, j’ai appris à être autodidacte et à utiliser les logiciels de graphisme par moi-même… En parallèle de mes études, j’ai monté mes premiers projets artistiques, surtout des spectacles. C’était une première forme d’entrepreneuriat, même si à l’époque je n’en avais pas conscience !

Un de mes rêves étaient de parler anglais couramment. Après mes 22 ans passés en France j’avais besoin de changer d’air. J’ai trouvé une formation Fashion&Design à New York pendant 9 mois. Parallèlement aux cours, je faisais un stage avec des créateurs de mode éco-responsables. Ma tutrice de stage était à son compte et travaillait avec une communauté de créateurs. J’ai eu le déclic en rentrant : un jour je serai entrepreneure ! J’avais adoré la flexibilité, la liberté, mais je ne savais pas encore quand je le ferai !

Tu as choisi de rentrer en France pour trouver un job ?

En rentrant en France j’ai déménagé de Strasbourg à Paris. J’ai été recrutée au service international de la Fédération Française du Prêt-à-Porter Féminin, organisme qui s’occupe de l’accompagnement de marques. On travaillait en lien avec la politique, l’international, les salons professionnels, les créateurs… Il y avait une connexion avec tous les acteurs du secteur, c’était très enrichissant.

C’est alors que j’ai commencé à cogiter sur ma propre entreprise dans la mode éco-responsable. J’ai écrit ma vision, mes idées, mais je me suis dit “Je suis qui pour faire ça ? Je n’ai pas de réseau, c’est mon premier travail”. Je suis restée 2 ans à la Fédération mais j’avais du mal à faire aboutir mes idées en interne, c’était frustrant.  Mon projet quant à lui devenait de plus en plus clair.

C’est à ce moment-là que j’ai rencontré une personne qui voulait aussi monter sa société. On avait deux idées très différentes, mais on s’est dit qu’on pouvait associer les deux. On a commencé à monter le projet ensemble, quand j’étais encore salariée. Puis à un moment il a fallu choisir, job ou projet ! J’ai demandé une rupture conventionnelle, ça a été toute une aventure mais j’ai fini par l’obtenir et on s’est lancées.

Comment s’est passée cette première aventure entrepreneuriale avec ton associée ?

On a créé une plateforme dont la vocation était de faire la promotion et la vente de marques éco-responsables dans la mode et le lifestyle. On a organisé un événement dans une galerie d’art notamment pour présenter les créateurs avec un concept arty. Notre but était d’allier mode, art et lifestyle, avec des valeurs éco-responsables.

Mais nous avons rencontré de nombreux problèmes techniques avec notre site, ce qui a contribué à faire échouer notre business. On a dû tout refaire, ça a été un coup dur pour l’entreprise et l’équipe. On avait perdu tout le trafic généré depuis le lancement. A ce moment-là, on a commencé à avoir des divergences dans la vision et on n’était au final pas assez complémentaires, donc on n’arrivait pas à s’accorder. J’avais le sentiment d’être à nouveau salariée avec des comptes à rendre, or moi, j’avais besoin de liberté ! S’associer c’est un véritable mariage. Dans notre cas, il y a eu le coup de foudre, l’idylle au départ, la lune de miel (on a voyagé ensemble !) et la situation s’est dégradée jusqu’au “divorce”. Or en s’associant on investit de l’argent et de l’énergie. Je voulais garder la société mais nous n’avons pas réussi à trouver un accord, donc elle a été fermée.

Entre temps j’ai rejoint un autre projet grâce à une opportunité, je devais introduire des créateurs sur une série télé. Ca m’a donné de l’air et surtout, ça m’a aidée à ne pas m’effondrer. Mais au moment de lever des fonds le projet n’a pas abouti, donc je suis partie.

Comment as-tu vécu ces deux difficultés successives ?

A partir de là, j’ai traversé une phase de questionnements : J’ai perdu ma boîte, je suis à la limite du burn-out… Qu’est-ce que je peux faire ?

Je ne voulais plus être salariée, je voulais rester flexible, donc je me suis tournée vers l’intérim qui est une bonne solution. J’ai fait de l’hôtessariat quelques mois. Entre temps j’ai rencontré un autre entrepreneur sensible à l’écologie. Lors d’un déplacement au Congo, il s’était aperçu qu’il n’y avait pas de salles de cinéma là-bas. A son retour il m’a proposé de prendre part à l’ouverture d’une salle de cinéma moderne. J’ai dit oui, sans savoir où cela allait me mener ! J’ai participé à la recherche des fonds de départ, notamment par le biais d’une campagne de crowdfunding. Je suis partie 3 mois au Congo pour contribuer à la recherche de sponsors, trouver la salle, mettre en place la communication… Bref, tout était à faire ! On a fini par ouvrir une première salle en 2016 puis deux nouvelles en 2017, avec des locaux et des associés sur place. Entre les deux, j’ai vécu une phase difficile financièrement et j’ai à nouveau était intérimaire. En effet, ce n’est pas parce qu’un projet est lancé qu’on peut en vivre. C’est juste le début d’une nouvelle étape de l’aventure ! A l’été 2017, j’ai rencontré une créatrice qui voulait lancer sa marque, et qui m’a sollicitée pour participer à une campagne de promotion. J’ai commencé  à la conseiller, et c’est là que je me suis rendue compte que ma passion depuis toujours était de conseiller, d’accompagner les marques et de fédérer des personnes autour d’une vision.

J’ai alors décidé de créer ma propre agence. J’avais peur au départ, puis j’ai osé me lancer seule. J’ai ouvert mon agence Poesia Consulting en novembre 2017. C’est la meilleure chose que j’ai faite de toute ma vie d’entrepreneure : me lancer seule, avec ma vision ! J’ai réussi à capitaliser sur toutes mes expériences des dernières années, le réseau que j’avais créé, les projets commencés… pour construire une entreprise à mon image.

Que fait Poesia Consulting et qui sont tes clients ?

J’aide des entrepreneurs, créateurs, artistes, rêveurs, jeunes marques et marques établies dans le développement de leurs visions à 360° : communication, digital, production, financement… Au départ je suis spécialisée en communication, c’est ma force, mais je ne veux pas me limiter à ce domaine donc je crée des partenariats avec d’autres agences pour accompagner les clients de A à Z.

J’aide mes partenaires à se faire connaître auprès du grand public et en B2B. Je fédère, j’organise et je connecte ! Je cherche principalement des créateurs et marques qui sont éco-responsables ou qui souhaitent s’engager davantage, car c’est mon positionnement.

Comment as-tu trouvé tes premiers clients ?

Mon tout premier client a été une entreprise dans laquelle j’ai été intérimaire pendant 4 mois. Le réseau, ça compte !

Puis j’ai rencontré une femme inspirante qui a un espace dans lequel elle organise des expositions. J’ai travaillé en partenariat avec une des commissaires d’exposition de son espace autour de l’Afrique. J’ai aussi lancé le concept du “Designers show”, à l’occasion duquel 5 créateurs de mode ont présenté de manière innovante leurs produits. Pendant la présentation des silhouettes, je souhaitais donner une place plus importante aux mannequins, qu’ils soient des ambassadeurs qui interagissent avec le public, et non pas seulement des porte-manteaux ! Je décrivais les produits en voix off, ça donnait plus de profondeur à la marque et aux produits. Chaque créateur a aussi présenté sa marque. Ce premier événement a été réalisé bénévolement. Ce n’est pas parce qu’on n’a pas le budget nécessaire qu’on ne peut rien faire. Ce type d’expérience permet de montrer de quoi on est capable pour ensuite convaincre des futurs partenaires.

Quel bilan tires-tu après ces premiers mois de création ?

Je suis très satisfaite car j’ai démarré seule en novembre, et j’ai constitué une équipe de plusieurs freelances en quelques mois. Chacun reste libre et indépendant et est responsable de ce qu’il fait. Le salariat a tendance à déresponsabiliser. Notre génération actuelle est dans une autre démarche, donc c’est le fonctionnement idéal pour moi. On teste différentes choses, on structure l’agence. Pour l’instant je suis en micro-entreprise en mon nom car les gens me connaissent, mais le but est de créer une vraie équipe et qu’on se développe.

Quelles sont tes sources d’inspiration ?

La créatrice qui m’inspire le plus est Coco Chanel. Elle a révolutionné l’univers de la femme et son patrimoine dure encore aujourd’hui. Ensuite, Madame Peugeot, la petite-fille du fondateur de Peugeot. Elle est mécène et a créé son espace pour aider les artistes à se faire connaître. Elle a su donner la parole aux artistes en créant un lieu à contre-courant avec une atmosphère particulière. J’admire les femmes indépendantes, à contre-courant et visionnaires.

Ensuite, le livre qui m’a le plus marquée est “Réfléchissez et devenez riche” de Napoleon Hill. Ca m’a confirmé des choses que j’avais ressenties, comme si j’avais compris le processus sans le connaître. Ca a mis des mots sur les étapes que j’avais traversées. Il donne les clés et principes pour atteindre ses objectifs. Sans ses clés, ça peut difficilement fonctionner.

Enfin, le livre “Ta deuxième vie commence quand tu comprends que tu n’en as qu’une” de Raphaëlle Giordano. Lire ce livre donne un déclic pour se lancer, dans un style romancé.

Comment se diriger vers le secteur de la mode quand on n’a pas d’expérience ?

Je conseille de commencer par se présenter bénévolement dans des projets, pour se rapprocher du milieu et se faire une expérience. Et bien sûr, aller visiter des expos, des pop-up, rencontrer des gens dans le milieu…

Quelle est la principale difficulté que tu as rencontrée ?

Le regard des autres, la pression de l’entourage. Parfois je me suis sentie incomprise. Quand tu as ta vision, tu essaies de l’expliquer et on te répond parfois “Je ne comprends pas”. Autour de toi tout peut semble aller mal, mais tu restes concentrée, tu sais que tu dois continuer, mais à l’extérieur l’entourage ne comprend pas toujours pourquoi tu persévères. Le mieux à faire est de ne pas se laisser distraire !

Le fait de ne pas être dans une case peut s’avérer difficile pour avoir de la valeur aux yeux des autres. Il faut se justifier quand on nous pose la question “Alors t’en es où ?”. Dans mon cas, avec le recul, je vois cette situation comme un manque d’assurance. C’était comme si j’étais testée dans mon projet : Tu vas vraiment aller au bout ? Tu y crois vraiment ? L’univers utilise notre entourage pour nous tester et si on réussit le test on passe à la prochaine étape!

Parfois il faut juste ne plus rien dire. Je ne dis plus quand ça ne va pas. J’ai toujours été optimiste, positive, je ne me plains presque jamais.

Si on se lance dans l’entrepreneuriat, il faut accepter sa situation sans se plaindre car c’est un choix personnel

Et au bout d’un moment, en restant optimiste, tu contamines l’entourage qui devient positif aussi ! Par chance, même s’ils ont été inquiets pour ma sécurité, mes parents m’ont toujours soutenue.

L’autre difficulté psychologique est la peur de décevoir. Si la famille peut te soutenir financièrement, c’est encore plus fort. Si ça ne se passe pas comme prévu, tu te sens mal à l’aise ! Tu te sens redevable et tu tiens à leur montrer qu’ils ont bien fait de te faire confiance.

Il faut aussi s’attendre à ce que tout ton environnement change. Tu rencontres en permanence des entrepreneurs, du coup ça devient plus compliqué d’être avec des gens qui ne sont pas entrepreneurs et qui ne comprennent pas cet état d’esprit. En devant entrepreneur tout notre état d’esprit change. Pour ma part, je développe une entreprise qui s’inscrit dans une démarche éco-responsable, donc j’adapte automatiquement mon mode de vie. Je consomme moins mais mieux. De manière générale, l’entrepreneuriat t’apprend à moins consommer, tu deviens moins matérialiste.

Un jour, j’ai lu dans un magazine qu’il y a trois types d’entrepreneurs définis en fonction de leurs motivations :

  • Celui qui veut devenir millionnaire
  • Celui qui veut devenir millionnaire et qui au passage change la société si possible (Steve Jobs par exemple)
  • Celui qui impacte l’humanité avec un projet qui donne du sens, qui transforme la société, et s’il rapporte de l’argent c’est la cerise sur le gâteau. Ce sont ses entrepreneurs qui révolutionnent le monde !

Pour moi l’entrepreneuriat est une façon d’améliorer le futur, de laisser une trace pour les générations futures. C’est pour ça que j’entreprends. Ca me donne du sens et de la joie tous les jours, surtout dans les phases d’épreuves. Je me mets au service de la création, or sans création on est tous pareil ! L’art donne du sens, il fait rêver les gens, il les fait réfléchir et prendre conscience du monde dans lequel on vit. A mon échelle, cela consiste à créer quelque chose et à donner de la place aux créations. Je crée des oeuvres d’art pour valoriser des oeuvres d’art, des créations… J’essaie toujours d’innover, de créer des synergies et de fédérer les gens.

Pour finir, quels sont tes conseils aux futurs entrepreneurs ?

Il faut commencer par mettre l’idée en forme, mettre sa vision par écrit. Cela permet déjà de voir si on peut tenir le coup financièrement 1 ou 2 ans. Mais il ne faut pas passer des mois sur sa vision car ce ne sont que des hypothèses.

La vraie vie ne se passe jamais comme le plan !

Dans mon cas j’avais le chômage et des économies, donc j’étais sereine pendant 2 ans. Mais il faut être prêt à faire des sacrifices : sorties, restos, shopping… vivre plus modestement ! Et passer plus de temps  à travailler, à rencontrer du monde, sortir de chez soi. Il n’y a qu’en sortant de chez moi que j’ai pu avoir des opportunités ! C’est une aventure tous les jours. Il faut donc être ouvert et aimer l’aventure. Je recommande aussi de parler de sa vision autour de soi pour trouver des gens prêts à soutenir le projet.

Un autre conseil : sortez des tableaux Excel et des business plans et allez sur le terrain ! Faites un premier test à petite échelle pour voir comment ça prend. Allez au bout de votre idée, ne le faites pas à moitié. Il faut faire le maximum mais en version miniature ! Au départ je voulais faire un concept store de 800 mètres carrés, alors on a organisé un mini concept store de 150 mètres carrés dans une galerie. Le plus important est de matérialiser son idée !

Et bien sûr, toujours persévérer, ne jamais baisser les bras, même si on échoue. L’entrepreneuriat nécessite de se remettre en question perpétuellement pour s’améliorer et se rapprocher de l’accomplissement de sa vision.


Pour en savoir plus sur l’activité de Natacha : son site – @natacha.ruiz.profil sur Facebook – @natacharuizpro sur Instagram – Le site de Poesia Consulting – @poesiaconsulting sur Facebook et Instagram

A suivre très prochainement, L’Escapade Poétique, concept-store éphémère, qui aura lieu durant Les Estivales organisées par Codecom sur le parvis de la Défense du 2 au 22 juillet 2018 !


Que retenir de l’expérience de Natacha ?

  • Entreprendre c’est faire le choix d’être libre et de créer un projet qui a du sens
  • Commencer par écrire sa vision, puis passer à l’action rapidement car de toute manière, la vie ne se passe jamais comme le plan
  • Ne pas rester derrière son ordinateur et son business plan, et aller faire des rencontres sur le terrain ! Il faut matérialiser son idée en faisant un premier test à petite échelle.
  • S’associer ? A condition de partager la même vision et d’être réellement complémentaires… au risque de rapidement divorcer !
  • Les difficultés de l’entrepreneuriat ? Le regard des autres et la peur de décevoir
  • Toujours persévérer et se remettre en question pour réussir à accomplir sa vision

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