Armelle : Slasheuse en traduction après avoir cherché sa voie dans le salariat classique

Armelle Reinach a eu beaucoup d’aventures professionnelles avant de fonder Akalita. Aujourd’hui, slasheuse en traduction spécialisée dans les jeux de société, elle fait aussi de la formation en langues étrangères et est interprète administrative. Dans cette interview, elle nous raconte comment elle s’organise au quotidien et dévoile ses meilleurs conseils pour réussir quand on se lance. 


Bonjour Armelle, raconte-nous ton parcours en toute transparence !

J’ai eu un BAC S, puis, sans idée précise de ce que je voulais faire « quand je serais grande », j’ai tenté un IUT de Gestion des Entreprises et des Administrations. Je ne suis restée que 3 mois. En partir a été ma première décision de « survie ». Puis j’ai pris le temps de réfléchir plus posément à ce que je voulais : j’ai fait une Licence Langues Étrangères Appliquées option traduction puis un Master Traduction Spécialisée Multilingue.

Pour faire bonne mesure, j’ai également passé une certification professionnelle dans l’évènementiel et le tourisme d’affaires.

En ce qui concerne mon parcours professionnel, j’ai été plein de choses… 

J’ai travaillé dans le monde du spectacle : ouvreuse dans un théâtre, photographe de spectacles, régisseuse lumière, assistante de communication pour une compagnie de théâtre. J’ai aussi travaillé dans le monde de la formation : soutien scolaire, professeur à domicile, formatrice aux Compagnons du Devoir. Et j’ai travaillé dans le monde du tourisme : machiniste aux Machines de l’Île de Nantes, gestionnaire de projet évènementiel affaires… À tout cela, on peut ajouter traductrice, réceptionniste dans un hôtel et conseillère en assurance. 

Et maintenant, traductrice pour de bon ! Mais comme je ne sais pas faire une seule chose à la fois, je suis également interprète administrative (j’accompagne les expatriés anglophones dans les différents méandres des démarches administratives françaises) et j’anime des formations. Je suis donc une slasheuse en traduction !

Avant de te lancer dans la traduction pour de bon, tu as quitté un CDI dans une mutuelle, comment cela s’est-il passé avec ton employeur ?  

Plutôt bien. Ils ont pour politique de ne pas accepter les ruptures conventionnelles sans projet professionnel défini. Je ne me souviens même plus de ce que j’ai bien pu raconter lors de cet entretien. 

J’avais déjà les grandes lignes de mon projet actuel mais sans plus. J’ai dû être suffisamment convaincante pour qu’ils me laissent partir sans procédure à rallonge, même si ça m’a paru interminable !

Comment est née ton envie d’entreprendre ? 

J’ai exercé de nombreux métiers et ça m’a donné l’occasion de tester différentes formes et conditions de travail. 

J’en ai tiré plusieurs conclusions : 

  • Les grosses boites, en tout cas celles que j’ai testées, ce n’est pas pour moi. Quand les procédures et la ligne hiérarchique remplacent le bon sens, ça me pose un vrai problème.
  • Travailler en autonomie me convient tout à fait.
  • J’aime être polyvalente et avoir plusieurs casquettes dans la même journée.
  • Travailler avec les langues étrangères au quotidien est un BESOIN.

Le salariat offre une sécurité, qui les années passant, ne compensait plus l’impression d’enfermement de mes différents postes. 

On passe trop d’heures au travail pour s’y morfondre. Moi, je ne m’y retrouvais plus.

Donc j’ai fini par sauter le pas. Terrifiée, angoissée, stressée, intimidée, un peu perdue mais carrément motivée !

Armelle devant son ordinateur en plein travail

Comment tes proches ont-ils réagi ?

Mon conjoint m’a soutenue dès le plus petit embryon d’idée. Il croit en moi pour deux, donc quand je flanche, il me rebooste ! Il m’apporte un soutien sans faille à chaque étape, proposant des thèmes WordPress pour le site, dessinant des croquis pour le logo, relisant mes textes etc.

Mes parents étaient à la fois fiers que j’ose et inquiets que je quitte une « bonne situation » pour me jeter dans l’inconnu.

Mes amis étaient plutôt enthousiastes et chacun y est allé de son conseil !

En quoi consiste ton activité de slasheuse en traduction ?

Aujourd’hui, j’ai 3 activités :

  • Je suis traductrice. Je travaille en anglais et en italien principalement, mais également en allemand. Je suis spécialisée dans la traduction de jeux de société mais je réalise aussi des traductions dans le domaine de l’art et du tourisme.
  • J’anime des formations, en langues bien sûr, et dans différents domaines, en fonction des besoins des organismes de formation qui font appel à moi.
  • En tant qu’interprète administrative, j’accompagne les anglophones vivant en France dans leurs démarches. Les opérateurs téléphoniques, les banques, les assurances, la Sécurité Sociale… Tous ces acteurs du quotidien n’ont que rarement des services spécialisés pour répondre à un interlocuteur anglophone. C’est là que j’interviens. Je peux communiquer avec chacun dans sa langue et transmettre les informations nécessaires afin de débloquer la situation.

Ta journée type, elle ressemble à quoi ?

Je n’ai pas vraiment de journée type mais beaucoup de petites habitudes à prendre et à garder.

Le défi consiste à trouver une organisation qui permette un bon équilibre vie perso/vie pro (quelle originalité, n’est-ce pas ?).

  • Avec mon conjoint, on essaye d’alterner pour emmener et aller chercher notre fille à l’école.
  • Je fais 20/30 minutes de yoga par jour, de préférence le matin, pour bien commencer la journée. Je me suis rendue compte que j’étais plus efficace et que je pouvais travailler plus longtemps en m’autorisant cette « pause sportive ». 
  • J’ai instauré 1 à 2 sessions mails par jour. Et entre les deux, je ne les regarde pas pour ne pas m’éparpiller.
  • J’essaie de me fixer des objectifs à long, moyen et court terme. Je liste au maximum le détail des tâches qui les composent avec des indicateurs de suivi ou de réussite, histoire de me voir avancer.
  • J’use et j’abuse des feuilles Excel – alors que je déteste ce logiciel – et des MindMaps pour synthétiser toutes les idées et les informations et suivre ma progression.
  • Je regroupe les tâches similaires : une session mail, une session téléphone, une session recherches internet, etc.
  • Je fixe des plages horaires dédiées à ma famille ou à un temps perso avec lesquelles j’essaie de déroger le moins possible (réussite mitigée pour l’instant).
  • Je fais attention à mes émotions : si je sens que je n’arrive pas à me concentrer sur une tâche, j’arrête et je passe à autre chose ; si je repousse systématiquement quelque chose, j’essaie de comprendre ce qui m’effraie pour lever les freins…
  • Tous les soirs, j’analyse ma journée pour y trouver un « petit bonheur » et un « enseignement » – un succès, ou un échec dont j’ai tiré les conclusions. Je les note dans un cahier pour pouvoir les relire et me rendre compte du chemin parcouru. Parfait en cas de moral en berne !  

Comment t’es-tu formée ?

Il me manque un certain de nombre de compétences pour être sereine dans cette aventure de l’indépendance. Les réseaux sociaux me sont complètement étrangers, je ne connais rien au marketing, qu’il soit digital ou pas, et impossible de trouver un mode d’emploi clair, étape par étape, de la procédure à suivre pour devenir indépendant !

Donc j’ai essayé de me former avec les ressources gratuites d’Internet. Et j’ai découvert LiveMentor. J’ai essayé plusieurs Universités en ligne, MOOC et équivalents mais eux sortent vraiment du lot. Malgré l’investissement que cela représentait, j’ai sauté le pas et j’en suis ravie !

Je suis actuellement une formation « Comment se lancer et réussir en freelance », qui ressemble un peu au « step-by-step » dont j’avais besoin et une autre sur la productivité (ou comment trouver un équilibre entre pro et perso).  Tout pile ce que je cherchais !

Je cherche encore un biais pour me former en marketing digital. Il existe plein de ressources gratuites encore une fois. Mais même si se former seul.e est possible, cela représente un temps et une énergie que je ne suis pas prête à fournir. Peut-être un accompagnement personnalisé…

Livre avec marqué sur la couverture you are your only limit

Quelles ont été les étapes de la création de ton activité ?

Je ne voulais pas que le nom de mon activité soit mon nom et mon prénom (quelle mise en avant ! Trop dur à envisager quand je me suis lancée…). Donc j’ai commencé à chercher un nom et un logo. Je voulais pouvoir me « cacher » derrière une carte de visite qui était censée asseoir un minimum de professionnalisme. Quel challenge pour un morceau de carton ! C’est comme ça qu’est née Akalita.

Pour le statut, je ne voulais pas sortir du système classique. J’avais entendu trop d’histoires, assisté à trop de déboires quand on ne peut pas présenter de feuilles de paie, que les cotisations sont trop faibles et qu’on se retrouve sans couverture santé. Je suis casse-cou mais pas téméraire. Et je ne voulais pas faire prendre ce risque à ma famille.

Alors je me suis rapprochée d’ACEASCOP, une SCOP (Société Coopérative et Participative) de ma région. Ce sont eux qui me salarient, en fonction de l’argent que je gagne : j’ai une feuille de paie, le régime général de la Sécurité Sociale et le statut salarié. Et surtout je ne suis pas au RSI (ou SSI maintenant) !

Comment as-tu obtenu tes premiers clients ?

Mon premier client pour l’instant ! Il s’agit d’un anglais, client de mon ancienne entreprise que j’avais accompagné personnellement dans nos méandres internes. Lorsque je suis partie, je l’ai tenu informé et il m’a rapidement proposé de continuer à l’accompagner sur d’autres problématiques.

C’est gratifiant, encourageant, que quelqu’un décide de me faire en confiance et accepte de payer pour mes services. Et c’est un bon entrainement : en termes de relation client, de rédaction de devis et de facturation, de définition de prestation, etc. 

Bon, comme je ne suis pas encore à l’aise pour déterminer le prix de mes prestations, je l’ai laissé choisir le tarif qui lui convenait. Ça me donnera l’occasion d’apprendre comment on justifie l’augmentation de ses tarifs !

Ton activité te permet-elle de vivre ?

Aujourd’hui, je ne vis clairement pas de mon activité. Je me suis lancée en septembre 2018 donc je ne le vis pas comme un échec ?

J’ai encore quelques mois d’indemnisation chômage devant moi. Je vais essayer de construire les bases les plus saines possibles d’ici là, et de trouver un emploi à temps partiel, en télé-travail dans l’idéal, pour pouvoir payer les factures et quand même continuer à développer mon activité.

Que conseillerais-tu à quelqu’un qui souhaite se lancer ?

C’est un double conseil que je donnerais : ne pas oublier sa motivation première et oser affronter ses peurs.

Personnellement, je n’en pouvais plus du moto-boulot-dodo, de ce travail vide de sens (pour moi) où il ne fallait surtout pas réfléchir pour être efficace, qui me minait tellement que je ne pouvais plus profiter de ma famille.

Alors aujourd’hui où je construis tous les jours un nouveau mode de vie, où c’est à moi de fixer les règles, j’essaie de créer un rythme où je peux profiter de ma fille, de mon mari, où je peux avoir du temps pour moi aussi.

Au milieu du stress des jours qui défilent, des nouvelles compétences que je ne sais pas comment acquérir, de la peur de l’échec, il est facile d’oublier que le but était à la base de pouvoir profiter des miens. Donc il faut en permanence modifier le fonctionnement, tester de nouvelles organisations et méthodologies pour atteindre l’objectif de base : faire quelque chose que j’aime et profiter de ma famille au quotidien !

Plein de gens ont écrit (et bien mieux que je ne le ferais ici !) sur la peur. La peur qui paralyse, la peur qui fait qu’on perfectionne à l’extrême ou que l’on reporte éternellement, tout pour ne pas se lancer… Je connais bien ces deux versions, perfectionnisme et procrastination ?

Mais oser… oser faire quelque chose qui l’instant d’avant était hors de portée… et surtout me rendre compte que le ciel ne s’est pas effondré, que la terre ne s’est pas ouverte sous mes pieds et qu’en plus je ne m’en suis pas si mal sortie… C’est gratifiant, euphorisant d’être capable de dépasser ses limites !

Je tire une fierté démesurée de mon premier post sur les réseaux sociaux (le partage d’un article de Charlotte sur les mamans entrepreneures, d’ailleurs !). Je n’ai rien créé, ça m’a pris 45 minutes, j’ai dû le refaire 2 fois pour mettre les liens comme il fallait et j’aurais pu aller me coucher après tellement ça m’a stressée ! Mais j’ai réussi à le faire, aucune déferlante de commentaires négatifs ou moqueurs ne m’est tombée dessus, LinkedIn n’a pas bloqué mon compte, je n’ai pas perdu toute crédibilité, ni rien de la sorte. 

Et je suis presque sûre de pouvoir le faire en 30 minutes la prochaine fois !


Que retenir de l’expérience d’Armelle ? 

  • Fixer des plages horaires entièrement dédiées à des activités personnelles permet de ne pas rester la tête dans le guidon et de souffler.
  • S’écouter et faire attention à ses émotions est indispensable pour détecter lorsqu’il est temps de faire une pause. 
  • Noter le petit bonheur ou l’enseignement du jour dans un carnet est une bonne méthode pour se remonter le moral quand celui-ci est au plus bas.
  • Osez affronter vos peurs : quoi qu’il arrive, n’oubliez pas que la terre ne va pas arrêter de tourner et que le ciel ne vous tombera pas sur la tête !

Pour retrouver Armelle, vous pouvez aller faire un tour sur ses réseaux sociaux, son site web ou sur Malt


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